« Droit d’accès au lac » : en êtes-vous vraiment sûr?

Il n’est pas rare, principalement dans les secteurs de villégiature, qu’un vendeur prétende détenir un droit « de passage » ou « d’accès au lac ». Cela constitue sans contredit un attrait pour les acheteurs potentiels. Mais qu’en est-il vraiment? Voici quelques éléments de réflexion qui vous aideront à vous poser les bonnes questions avant d’annoncer un chalet à vendre « avec » accès au lac.

Existence de la servitude

Tout d’abord, disons qu’un droit de passage ou d’accès au lac est habituellement décrit dans l’acte de vente. On dit « habituellement » car il peut arriver que certains notaires ne l’aient pas inscrit. Il faut donc, en plus de prendre connaissance de l’acte de vente, vérifier le certificat de localisation à jour et se procurer les informations au Registre foncier. Même lorsque la servitude est consignée dans l’acte de vente, le texte même doit être analysé rigoureusement. En effet, la présence d’une servitude n’implique pas automatiquement que les nouveaux acquéreurs pourront également en bénéficier. Voici pourquoi. Une servitude peut être :

  • PERSONNELLE; rattachée à une personne qui peut être désignée dans le texte de l’acte de vente; OU
  • RÉELLE; rattachée au lot bénéficiaire du droit (fonds dominant).

De plus, il est important de porter à l’attention des acquéreurs qu’une servitude peut être assortie d’obligations ou de limitations, telles que le déneigement ou la possibilité de circuler uniquement à pied.

Transmissibilité et extinction de la servitude

a) Transmissibilité
Lors de la vente de l’immeuble, la servitude personnelle, c’est-à-dire celle bénéficiant à une personne désignée, s’éteindra et les nouveaux acquéreurs ne pourront pas bénéficier du droit de passage sauf si une nouvelle servitude est créée dans l’acte de vente, requérant ainsi le consentement du propriétaire du lot accordant la servitude (lot servant). Pour sa part, la servitude réelle, rattachée au lot, sera transmise aux nouveaux acquéreurs lors de la vente de l’immeuble. Elle devrait normalement apparaître au nouvel acte de vente.

b) Non-usage
Un autre élément à prendre en compte est la prescription de la servitude. À titre d’exemple, un droit de passage se prescrit par le non-usage pendant 10 ans. Autrement dit, si un propriétaire n’utilise pas son droit de passage pendant plus de 10 ans, ce droit pourrait faire l’objet d’une contestation par le propriétaire l’ayant accordé. Sauf entente, cette contestation se fait généralement par le biais des tribunaux. Le non-usage de la servitude au cours des 10 dernières années sera alors au coeur du débat. Advenant que le propriétaire ayant accordé le droit de passage réussisse à démontrer ce non-usage, le juge pourrait constater l’extinction de la servitude. Le courtier ou l’agence doit donc s’assurer, auprès du propriétaire qui affirme avoir un droit de passage pour accéder à un lac, que ce dernier a effectivement utilisé son droit au cours des 10 dernières années.

À RETENIR

À titre de courtier ou d’agence, vous ne pouvez pas transmettre au public ou à d’autres membres des informations qui ne sont pas vérifiées. Ainsi, avant d’annoncer un « accès au lac » ou avant de prétendre à tout autre droit créé par une servitude, il est important :

  • de valider l’existence et la nature de la servitude dans l’acte de vente et au Registre foncier; ET
  • de vous assurer que le propriétaire a utilisé son droit au cours des 10 dernières années ou que son droit ne s’est pas éteint autrement (art. 1191 et 1192 CCQ).

Il importe donc de procéder à des vérifications rigoureuses à cet égard.

Toutefois, ne vous aventurez pas à vous prononcer sur l’existence d’une servitude et sur son type; cela relève du conseil juridique. N’hésitez pas à faire appel à un juriste si vous doutez du libellé de la servitude. À l’ère de l’information, la rigueur dans les vérifications que vous effectuez demeure la plus-value à offrir à votre clientèle.

Dernière mise à jour : 03 mai 2013
Numéro d'article : 122869